LES LOUPS
1/
Dans le Grand Nord du Canada, le désert froid est immense,
la plaine blanche s’étend jusqu’à l’horizon et les forêts de sapins sont noires et tristes.
Au milieu d’un fleuve glacé, s’avançait un attelage de chiens-loups.
Leur fourrure était recouverte de neige.
Ils tiraient un traineau qui glissait dans la neige molle.
Sur le traineau, un cercueil en bois, des couvertures et des outils.
Un homme à l’avant, chaussé de raquettes, et un autre homme à l’arrière,
avançaient de toutes leurs forces, le visage couvert de givre.
Dans le cercueil, ils transportaient leur camarade mort :
dans le Grand Nord glacé, le froid l’avait tué.
Une heure passa, la nuit tombait. Soudain, dans le silence, ils entendirent un cri lointain,
puis un second, plus proche.
« Les loups, dit Bill (l’homme à l’arrière), on dirait qu’ils nous cherchent !
– C’est qu’il n’y a pas grand-chose à manger, par ici ! »
La nuit tombée, les deux hommes installèrent leur campement près du fleuve.
Le cercueil leur servit de sièges et de table.
Bill prit six poissons pour les distribuer aux chiens.
Quand il eut fini, un des chiens n’avait pas eu son repas !
« Mais, Henry, combien avons-nous de chiens ?
– Tu sais bien que nous en avons six !
– Comment se fait-il qu’il manquait un poisson ?
– Tu as dû mal compter…
– Non non, je crois qu’un autre animal est venu manger un poisson, et il est reparti. »
Les deux hommes entendirent encore un long cri dans la nuit.
« Tu crois que c’était un loup ?
– Certainement. »
Soudain, toute la meute de loups se mit à hurler, et les chiens aboyèrent.
Ils avaient peur et se rapprochèrent du feu. Bill y ajouta du bois et alluma sa pipe.
« Tu vois, dit-il à Henry en montrant le cercueil, je me demande ce que cet homme était venu faire
dans ce pays, mais au moins, il n’a plus peur de rien ! »
Henry lui fit signe de se taire, il venait d’apercevoir des yeux briller dans le noir tout près.
Les loups les entouraient. Les chiens, terrorisés, vinrent se serrer contre eux.
L’un d’eux s’approcha tant du feu qu’il se brûla et hurla, ce qui fit disparaître un moment
les paires d’yeux autour d’eux.
« Combien nous reste-t-il de balles ? demanda Henry.
– Trois seulement.
-Sales bêtes. Et ce froid ! Ah que j’aimerais être au chaud chez moi ! »
Les hommes se couchèrent dans leurs couvertures. Ils firent du feu toute la nuit pour que les loups ne s’approchent pas.
En s’endormant, Bill pensa :
« Je me demande pourquoi les chiens n’ont pas aboyé
quand un loup est venu manger un poisson… »
2/
Le lendemain matin, à 6 heures, il faisait encore nuit noire.
Le soleil se lève tard en hiver dans le Grand Nord.
Bill préparait du café, soudain il cria :
« Hé ! Il n’y a plus que 5 chiens !
– Il a du se faire dévorer !
– Mais nous n’avons rien entendu !
– Oui, c’est bizarre …. »
Le déjeuner terminé, les deux hommes chargèrent le traîneau
et repartirent dans la forêt.
Ils avancèrent et les loups les suivirent toute la journée.
Le soir, ils campèrent à nouveau.
Pendant que Henry donnait à manger aux chiens, un loup bondit
et attrapa un poisson dans sa main.
» Ah ! la sale bête !
– comment était-il ?
– Je n’ai pas eu le temps de bien le voir, c’est un loup qui ressemble à un chien. »
Pendant qu’ils mangeaient, ils aperçurent encore des yeux autour d’eux.
» Allez – vous en ! cria Bill avant de s’endormir près du feu.
Le lendemain, un chien avait encore disparu.
« Ce n’est pas possible !
– Les chiens se font dévorer sans nous réveiller, c’est incroyable !
– Pauvre chien, c’était un bon chien… »
Les hommes avancèrent encore toute la journée, toujours suivis par les loups.
Il manquait deux chiens pour tirer le traîneau. Ils avaient peur et froid.
Le soir Bill attacha les chiens serrés les uns aux autres et à un tronc d’arbre
tout près d’eux.
« Regarde Henry, comme ça ils ne pourront pas bouger, nous serons tranquilles. »
La nuit, autour du feu, les paires d’yeux étaient là.
« Ah si nous avions des balles pour leur tirer dessus ! »
3/
Soudain, ils virent un animal ressemblant à un chien
s’approcher des quatre chiens attachés.
« Regarde, dit Bill, c’est une louve. Elle attire les chiens un à un loin de nous
et toute la meute leur saute dessus pour les dévorer ! »
Henry frappa dans ses mains et la louve disparut dans la nuit.
« Cette louve est très maligne. Elle a l’air de connaître l’heure de repas des chiens.
Je crois qu’elle a été apprivoisée.
– Elle est à moitié chienne.
– Elle est très dangereuse. Avec un peu de chance, on pourra la tuer avec nos trois cartouches. »
Le lendemain matin, un autre chien avait disparu. Il n’en restait plus que trois.
Les hommes étaient furieux.
« La nuit prochaine, je tuerai cette louve, murmura Bill. »
Les deux hommes reprirent leur marche. Ils trouvèrent les os du chien disparu peu après.
« Ces loups doivent être affamés, ils vont finir par nous dévorer aussi !
– Ah ! Si je sors vivant de ce cauchemar, je ne reviendrai jamais dans ce pays de malheur ! »
Au milieu de la journée, Bill prend le fusil et dit :
« J’en ai assez de ces bêtes qui nous suivent ! Reste là, je vais aller voir.
– Sois prudent Bill, répondit Henry. »
Bill partit le fusil sur l’épaule et revint une heure plus tard.
« Je les ai vus, dit-il, ils sont très maigres, ils doivent avoir tellement faim !
Ils vont nous suivre pour nous manger. Sinon, c’est eux qui mourront de faim ! »
Les hommes se remirent à avancer.
Quelques minutes plus tard, ils aperçurent une forme sombre ramper dans la neige.
« C’est la louve, cria Bill !»
Elle s’approchait tout doucement en regardant les hommes.
« Elle doit faire 75 centimètres de haut et un mètre cinquante de long.
– On dirait un énorme chien de traîneau.
– Hé ! Gros chien ! Viens ici ! Bill appela.
– On dirait qu’elle n’a pas peur.
– Vas-y, il faut la tuer ! »
Bill prit le fusil pour le mettre à son épaule mais l’animal disparu aussitôt.
« Bien sûr, cette louve ou cette chienne est assez intelligente pour reconnaître un fusil ! »
La nuit venue, les deux voyageurs s’arrêtèrent.
Les trois chiens s’allongèrent épuisés dans la neige.
Les deux hommes ne purent pas dormir : il fallait se relever sans cesse pour remettre du bois
dans le feu et éloigner les loups.
« Les marins racontent que les requins suivent les navires, dit Bill.
Les loups sont comme des requins. Ils finiront par nous avoir. »
4/
Heureusement, aucun chien ne disparut dans la nuit.
Mais pendant la matinée, le traîneau se renversa et il fallut détacher les chiens.
L’un d’eux se sauva à toute vitesse et courut vers la louve qui attendait.
A chaque fois que le chien s’approchait d’elle, elle reculait de quelques pas,
comme pour l’entraîner loin des hommes.
A un moment il regarda les hommes derrière lui.
Bill essayait d’attraper le fusil coincé sous le traîneau renversé.
Le chien comprit qu’il était tombé dans un piège et essaya de s’enfuir
mais une douzaine de loups bondit après lui.
Bill saisit enfin le fusil et courut après les loups.
Peu après , Henry entendit un coup de feu, puis deux autres.
Il comprit que Bill n’avait plus de cartouches.
Il y eut un grand bruit, des grondements et des cris. Henry entendit Bill hurler.
Puis le silence retomba sur le paysage glacé.
Henry resta longtemps assis sur le traîneau. Il savait bien ce qui était arrivé.
Il finit par se lever et tira lui-même le traîneau avec les deux derniers chiens.
Dès que la nuit commença à tomber, il s’arrêta pour camper et mangea. Il ne put pas dormir.
Les loups étaient tout près.
Il fit un grand feu toute la nuit car c’était la seule façon de ne pas se faire dévorer.
Le lendemain, Henry repartit sans le cercueil qui était trop lourd.
Il put avancer assez vite avec ses deux chiens.
Les loups suivaient, maigres, la langue rouge et pendante.
Le soir, Henry coupa une grande quantité de bois. Il avait très sommeil mais il ne pourrait pas dormir.
Si jamais il s’endormait, ce serait la fin pour lui.
5/
Dans la nuit, Henry vit la louve à quelques mètres qui le regardait.
Sa gueule s’ouvrait avec gourmandise,
ses crocs blancs brillaient et la salive lui coulait des lèvres.
Henry, terrorisé, lui jeta une branche enflammée et la louve s’enfuit.
Le lendemain matin, un loup plus courageux que les autres se jeta sur lui.
Il le repoussa avec du bois enflammé et resta toute la matinée près du feu.
Il s’endormit un tout petit peu et rêva de sa maison.
Mais soudain, il sentit des crocs lui déchirer le bras. Il se réveilla et sauta au milieu du feu.
A pleines mains, il attrapait les branches brûlantes et les lançait.
Ses gants le protégeaient. On aurait dit un volcan.
Henry avait le visage brûlé, les cils et les sourcils grillés. Les loups reculèrent.
« Vous ne m’aurez pas, sales bêtes ! criait-il.»
Il resta derrière le feu pendant plusieurs heures, il était épuisé.
Les loups avaient mangé ses deux chiens.
Quand il n’eut plus de bois, il s’allongea, regarda la louve et lui cria :
« Tu peux me dévorer maintenant ! Ah, vous m’avez eu ! »
Il ferma les yeux, il entendit un bruit de traineau ! il s’évanouit.
Quand il se réveilla, il sentit que les loups étaient partis. Des hommes l’entouraient.
Ils le questionnèrent dès qu’il le virent ouvrir les yeux. Henry murmura :
« La grande louve … elle a dévoré Bill… le poisson… les chiens… »
Et il s’endormit aussitôt pour de longues heures.
Fin du chapitre I.
CROC BLANC adapté facile à lire LE LIVRE >>>>>
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