catégorie: Croc Blanc
Croc Blanc – chapitre V – 5
Croc Blanc – chapitre V – 5
Publié le 02/07/2018

1/

Depuis  plusieurs jours,   tout le monde  s’agitait   dans le camp.

indiensdLes tentes   avaient été démontées : la tribu  des   Indiens   allait chercher   un autre terrain de chasse.

 

Le louveteau  ne voulait pas  partir. Il préférait  rester dans la forêt.   Il décida de s’enfuir.   Il entra dans le fleuve   où la glace commençait   à se former   et nagea le long de la rive,   puis il se blottit sous un buisson.    Les heures passèrent, il dormit.

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Il fut soudain réveillé   par la voix  de Castor-Gris  qui l’appelait.    Il entendit aussi d’autres voix : celles  de la femme  de l’Indien  et  de son fils Mit-Sah.   Croc-Blanc   tremblait de peur   mais il ne bougea pas.   Les voix s’éloignèrent et il attendit   encore plusieurs heures.

Puis il se leva et se mit à courir joyeusement. Il se sentait heureux d’être libre.

Mais la nuit tombait,    et  il   se sentit tout à coup très seul.      Il s’assit  sur son derrière  et se mit à écouter  le silence de la forêt.     Il sentait le danger partout,    un danger invisible    qui se cachait   dans l’ombre noire   des énormes troncs d’arbres.    Il faisait froid aussi,    et il n’avait  plus de tente où se réfugier.

Croc-Blanc  se souvenait  du camp  et des feux,  des voix des femmes  et des hommes,  des aboiements des chiens.  Il avait faim   et il se souvenait   des morceaux de viande   et de poisson qu’on lui jetait.    Il avait pris  l’habitude  de la compagnie  des hommes  et il ne savait plus  se débrouiller seul.   Qu’allait-il devenir ? Il avait peur.

A cause du froid,   un arbre fit entendre   un craquement violent   au-dessus de sa tête.   Il sursauta et fut pris de panique.   Il avait vraiment besoin des hommes.   Il sortit de la forêt et chercha le camp,   mais tout le monde était parti.

Où aller maintenant ?

louphIl s’assit   à l’emplacement  de la tente   de Castor-Gris,    leva sa gueule vers le ciel et poussa un long hurlement dans la nuit.

 

 

Le lendemain,   il s’enfonça  dans la forêt  pour essayer   de retrouver la piste des hommes.        Il décida de suivre  la rive du fleuve.  Il courut toute la journée.   La glace commençait à se former.     Il courait,  glissait,  nageait,  grimpait sans s’arrêter.  Il courut aussi toute la nuit.

Le deuxième jour,  il était  très fatigué  de courir.  Ses pieds saignaient.  Il se mit à neiger   et Crocs-Blanc   fut obligé   de s’arrêter.    Il était épuisé.

 

2/

Le louveteau  était  perdu  dans  la  forêt.  Il   n’aurait  jamais retrouvé   les  Indiens  s’il n’avait pas entendu   un coup de feu.

Le  maître  de  Croc-Blanc   avait décidé de traverser le  fleuve  et s’était installé  sur l’autre rive   avec  sa famille.

Klou Klouch,   la femme de Castor Gris,   avait aperçu un élan   et  avait tiré un coup de fusil   pour   tuer  l’animal  et  avoir  de  la viande.

Croc Blanc,  qui  entendit  le  coup  de feu,    traversa le fleuve et retrouva la piste des hommes,  en  flairant  leur  odeur.

En trébuchant  et en boitant,  il suivit  cette piste  parmi les arbres.

Les bruits des campements   arrivèrent   enfin  à ses oreilles  et bientôt,   il vit la lueur du feu.

Klou Klouch faisait la cuisine et Castor-Gris mangeait.   Il y avait de la viande fraîche dans le camp !

Le louveteau  s’attendait  à être battu.   Il s’aplatit  sur le sol  et  avança  quand même.   Il détestait  la punition   qu’il allait recevoir,   mais il savait   qu’il retrouverait  la chaleur du feu,   la protection des hommes  et la compagnie des chiens.

Il avança donc  et se traîna  sur le ventre  jusqu’à  la lumière du feu.

Castor-Gris l’aperçut  et s’arrêta de manger.   Croc-Blanc rampa vers lui,    la tête basse,   honteux. Finalement,   il se coucha aux pieds de son maître.   Il tremblait  en attendant  sa punition.

 

Il vit la main de Castor-Gris  bouger   et il s’aplatit encore plus.   Mais le coup ne tomba pas.

Le louveteau  leva les yeux.   Castor-Gris   déchirait en deux  son morceau de viande !    Castor-Gris lui donnait un  morceau  de viande  !     Il le flaira,  puis le mangea.

Castor-Gris lui donna encore  de  la  viande  et  le protégea  contre les autres chiens !

Puis,  Croc-Blanc s’étendit aux pieds de son maître,   regardant  avec amour   le feu qui le réchauffait, heureux de la compagnie des hommes.

 

3/

A la fin  de décembre,  Castor-Gris  partit en voyage  sur la glace  du fleuve  Mackenzie, accompagné  de son fils  Mit-Sah  et de sa femme  Klou Klouch.

Il conduisait  un traîneau conduit  par les plus gros chiens.

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Un second traîneau, plus petit,  était mené  par Mit-Sah  avec les jeunes chiens.

Ce traîneau  était  plutôt  un jouet mais le jeune indien   était très fier.   Il apprenait  ainsi à mener  les chiens.

Ce petit traîneau  transportait  quand même  cent kilos  de bagages  et de nourriture.

 

On attela  Croc Blanc  pour la première fois.  On lui passa  un gros collier  autour du cou relié  à une courroie  qui se croisait  sur sa poitrine  et sur son dos.   A cette courroie était attachée  une longue corde  qui servait à tirer le traîneau.

 

Six autres chiens  étaient attelés  avec lui . Ils avaient  neuf ou dix mois,  le louveteau avait  huit  mois.   Chaque bête tirait le traîneau  à l’aide d’une corde.  Les cordes étaient toutes de longueur différente.

Le traîneau  était en écorce de bouleau  et son avant  se relevait  pour ne pas s’enfoncer  dans la neige.

La différence de longueur  des cordes  empêchait  les chiens  de se battre entre eux.

Si un chien se retournait  pour mordre  celui qui le suivait , il recevait un coup de fouet  sur le nez.

Par contre,  si un chien  voulait attaquer  celui qui était devant lui,  il devait  courir  plus vite,  ainsi que le chien poursuivi  qui avait peur d’être mordu.   Ils tiraient  donc le traîneau plus fort   et tous les chiens  de l’attelage  accéléraient.

Mit-Sah  avait remarqué  que Liplip  était très méchant  avec Croc-Blanc.  Il avait  alors eu l’idée  de l’attacher  à la plus longue  corde  de l’attelage. traineau

Liplip marchait donc en tête.   Tout le groupe des chiens  avec le louveteau  put alors  le poursuivre.  Liplip dut courir  toute la journée  le plus vite possible  avec la crainte d’être mordu.   Quand il essayait  de se retourner  pour mordre ses poursuivants,   Mit-Sah  lui donnait  un coup de son fouet  long de cinq mètres.   Pour que les chiens aient encore plus  envie de l’attaquer,  il donnait à Liplip  les plus beaux morceaux  de viande,  ce qui rendait  les autres  jaloux et furieux.

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4/

Croc-Blanc  faisait bien  son travail.  Il avait presque  oublié  sa mère.  Il se conduisait  en bon chien  de traîneau  pour obéir  à son maître.

Quand  il n’était pas  dans l’attelage,  il restait  à l’écart  des chiens  qui ne l’acceptaient  toujours pas comme  un des leurs.   Mais si  l’un d’eux  s’approchait seul  de lui,  il lui sautait  dessus.   Alors les chiens avaient  peur  de lui.

Il continuait à suivre  la seule loi importante  pour lui :  obéir  au plus fort et  écraser  les plus faibles. De plus,  il essayait  toujours de voler  le repas  des chiens.  Ceux-ci  devaient  manger  le plus vite  possible  car ils savaient  qu’ils ne pourraient pas   se défendre.  Le jeune loup  était devenu  leur maître  car il était  plus fort.

Par contre, il obéissait  à Castor-Gris  qui était encore plus fort.  Il ne ressentait  aucun amour  pour son maître.  C’était  un homme violent  qui ne donnait  jamais de caresses.

Le voyage   à travers  le Grand Nord  dura  plusieurs mois.  Ils arrivèrent  enfin au campement  près d’un lac.

 

 

 

Dans les campements,  les chiens  avaient le droit  de ramasser  les déchets  de viande  pour se nourrir.

 

Un jour, Croc Blanc  s’approcha  d’un garçon  qui découpait  de la viande d’élan  et commença à manger les déchets.   Mais le garçon  prit un bâton  et se dirigea vers lui.   Le louveteau  s’enfuit mais comme  il ne connaissait pas  encore bien le camp,  il se retrouva vite coincé  entre deux tentes  et le jeune indien.  Celui-ci allait  le frapper.

Croc-Blanc  était furieux  car  il n’avait rien fait de mal.   Il se jeta sur le garçon et le mordit à la main. Pourtant,  il savait  que c’était absolument  interdit de mordre  un homme  et qu’il allait  recevoir  une  terrible punition.

Il s’enfuit près de Castor-Gris  et s’aplatit  derrière ses jambes  quand le garçon  vint se plaindre  avec ses parents.  Mais  Castor-Gris,  sa femme Klou Klouch,   et  son  fils  Mit-Sah  ne voulurent  pas  punir le louveteau.

Les deux familles se disputèrent.  Croc-Blanc écoutait  la bataille des mots  sans bouger.   Il avait compris que  seuls ses maîtres  pouvaient  le frapper  quand ils le voulaient  et  qu’il n’était pas obligé  d’obéir  aux autres.

Plus tard,  Mit-Sah  alla seul  dans la forêt  pour ramasser du bois  pour le feu.  Il rencontra  le garçon qui avait été mordu.  Ils recommencèrent  à se disputer.  Bientôt, d’autres garçons  accoururent  et ils attaquèrent tous  Mit-Sah.

Le combat  fut dur  pour lui,  et il recevait  des coups de droite  et de gauche.   D’abord, Croc-Blanc regardait  ce qu’il se passait.   Puis il bondit  au milieu  des combattants.   Cinq minutes après, il y avait  des combattants en fuite  dans toutes les directions   et du sang sur la neige.

Lorsque,  de retour à la tente, Mit-Sah raconta l’aventure,  Castor-Gris donna  beaucoup de viande  à Croc-Blanc.

Le louveteau  avait compris  que c’était bien  de défendre ses maîtres,  même  en mordant  d’autres hommes.

 

5/

Kiche,  sa  mère,  était  devenue  un souvenir  lointain  du passé.

Le louveteau  avait abandonné  la liberté  pour toujours,   il  vivra  avec  des  hommes.

L’Indien  Castor-Gris,  sa famille  et ses chiens  repartirent  en voyage.   Ils  arrivèrent au  nouveau  camp  en avril.

Croc-Blanc avait un an.  Il était  devenu  l’animal  le plus grand  et le plus fort de tous.   Il avait le pelage gris  et la force d’un loup  mais  il était  apprivoisé  presque comme un chien.  Les autres chiens  ne l’attaquaient  plus du tout.

 

 

Il y avait  un vieux chien   qui s’appelait  Basik.    Croc-Blanc le rencontra pour la première fois  lors du  dépeçage  d’un élan.    Les  chasseurs  avaient  tué  cet  élan  et  le  découpaient  en  morceaux.

 

Le louveteau   avait reçu un sabot  avec   un morceau de viande.    Il le dévorait   tranquillement   derrière un buisson   quand Basik  s’élança sur lui.  Croc-Blanc  le mordit profondément  et il recula. Basik, très surpris,   resta  sur place.   Les deux  adversaires  se regardaient,   l’os saignant entre eux. Basik  regardait  Croc-Blanc  d’un air menaçant.   Il savait  que le jeune loup  était devenu  plus fort que lui.   Mais l’odeur fraîche  de la viande  qui montait  à ses narines   l’attirait tellement   qu’il ne put attendre   que Croc-Blanc  soit parti.

Quant il saisi le sabot,  le louveteau  se jeta sur lui,  lui déchira l’oreille,   le mordit à la gorge  et à l’épaule.   Basik  comprit  qu’il était  devenu  trop vieux   pour se battre  avec un jeune loup   et il s’éloigna.

 

Grâce à cette  nouvelle victoire,  Croc-Blanc  put se promener  dans le camp  sans peur et  sans honte. Jamais plus  il ne reculait  devant un chien,   il ne craignait   ni les crocs  ni les pierres.   Il allait droit devant,  sauvage et   solitaire,   ne regardant  ni derrière lui   ni autour de lui.   Il ne voulait  ni ennemis, ni amis.  La seule chose qu’il  voulait  c’était  avoir  la paix.

 

Au milieu de l’été,  alors  qu’il se promenait  dans la forêt,  il tomba  nez à nez  avec Kiche,  sa mère.  Elle était assise  devant une tente  toute neuve  que Croc-Blanc  n’avait  pas vue  auparavant.

Il s’arrêta net  en la voyant.  Il la regarda.  A son approche,  Kiche  se mit à gronder.    Avec joie, il s’avança vers elle  pour la lécher.  

Mais elle montra ses crocs   et le mordit   de toutes ses forces   à la joue !  

Croc-Blanc  recula d’un pas, il ne comprenait pas.  Il ne savait pas   qu’une mère loup   ne reconnaissait pas   ses enfants   quand ils avaient grandi.

Kiche  avait  d’autres louveteaux   maintenant,   aussi  elle  ne le reconnut  pas.   Pour elle,  il était  devenu  un étranger,  un danger  pour  ses nouveaux  petits. 

Un  des  louveteaux  vint renifler  Croc-Blanc  entre ses pattes.  Kiche  le mordit encore.   Le jeune loup  gémit  et recula.

Alors il regarda Kiche lécher  ses petits  et il partit.   Il se dirigea  vers le camp  à petits pas.

 

Il venait aussi  de comprendre  que les mâles  ne s’attaquent  jamais aux femelles. 

Dans les jours qui suivirent,  il oublia  complètement  sa mère.

Les mois passèrent.  Croc-Blanc  était devenu  comme un vrai chien adulte.

S’ il n’était pas  venu vivre  avec les hommes,  il serait devenu  un vrai loup  sauvage  du Grand Nord.

Mais les hommes  lui avaient appris  leurs lois.  

Comme il n’avait pas  pu se faire accepter  par les chiens,  il était devenu  un animal  féroce et solitaire.  

Son maître était  très fier de lui.

 

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